Revue TYPES 1 - Paroles d’hommes

Dieu n'est pas mort

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Revue TYPES  1 - Paroles d’hommes - N°1 Janvier 1981 

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DIEU N'EST PAS MORT - Il bande encore

" Paternité " (1380 — qualité de père en parlant de Dieu).

Il était une fois un mec qui s'appelait Dieu. Il était tout puissant et il se trouvait pas mal comme mec. Alors, il décida d'en faire un autre à son image. Il venait d'inventer le clonage.

Comme il avait l'esprit scientifique, il décida de ne pas s'arrêter en si bon chemin. mais là, ce fut la bavure : à partir de l'homme, il fit une femme et lui donna la capacité d'assurer la reproduction de l'espèce.

Les années ont passé par millions, et certains prétendent même qu'il n'a jamais existé.

Les femmes ont mis les enfants au monde et on les a vénérées pour ça. Et puis les hommes ont trouvé, petit à petit, que ça commençait à bien faire, et la paternité à son tour a vu le jour.

Mais les hommes pouvaient peut-être avoir le droit de vie ou de mort sur leurs enfants, ils ne pouvaient toujours pas les mettre au monde. Ils apprenaient lentement à maîtriser leur environnement, s'échinaient à le modifier, à le saboter, mais la vie du ventre des femmes, ils ne pouvaient la contrôler que de l'extérieur.

Heureusement, Dieu avait tout prévu. Grâce à lui, ou à cette frustration des hommes, la situation est en train de se rétablir.

L'idée est simple : vous persuadez les femmes, à grand renfort de progrès des sciences et des techniques, que la grossesse est une maladie qui nécessite une surveillance médicale serrée. Vous écrivez des articles dans les magazines où vous leur expliquez comment il faut allaiter. Vous les entourez de toutes sortes de gadgets électroniques pour le jour de l'accouchement. Et comme la plupart d'entre elles sont persuadées que c'est une expérience épouvantable, elles entrent dans votre jeu.

La première manche est gagnée : grossesse et accouchement ne sont plus l'affaire des femmes entre elles, mais celle du corps médical, masculin pour une bonne part. Toutefois cette mainmise persiste à rester extérieure : ça se passe toujours DANS et HORS le corps des femmes.

Pour la deuxième manche, vous inventez l'insémination artificielle. C'est pour le coup que l'histoire de la petite graine prend tout son sens : l'inséminateur (im)plante les spermatozoïdes dans l'humus fertile de l'utérus. Oui, mais ça n'est pas encore vraiment ça.

Alors, idée géniale, on ré-invente le clonage. La première fois que j'en ai entendu parler, c'était dans un bouquin de science-fiction, une idée un peu bizarre, mais marrante.

La deuxième fois, c'était à travers les média, des chercheurs américains affirmaient avoir réussi. La, rien à redire : vous prenez un individu, ou plutôt quelques cellules, et vous faites le même avec. Ils ont prétendu que ça avait marché avec un magnat de l'industrie .

Le double parfait. Adam. Dieu. Être soi-même et l'autre. S'auto-créer. La boucle est bouclée, la frustration reléguée aux accessoires de la psychanalyse. La Paternité absolue.

N'allez pas croire que je veuille faire de l'enfantement la chasse sacrée des femmes, refuser aux hommes de vivre activement, dès avant la naissance, leur paternité. La déesse Mère est morte, et d'ailleurs certains chercheurs affirment même que la différenciation mâle-femelle n'est pas si absolue que les hommes ne puissent pas un jour arriver aussi à être enceinte.

Moi, les " nouveaux pères ", je les verrais bien avec le ventre en avant, bien tendu, plein de vie, mais s'ils devaient être des narcisses en blouse blanche penchés tendrement sur des bouillons de culture, ça m'angoisserait, pas vous ?

Francine Hatry

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Revue TYPES - Paroles d’hommes - N°1 Janvier 1981

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01429398/document

 


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