Revue TYPES 2/3 - Paroles d’hommes

Plaisirs et sexualité - Les dessous de l'érotisme

EuroPROFEM - The European Men Profeminist Network europrofem.org 

Contributions by language

 

Précédente Accueil Suivante

12_type2.htm

 

Revue TYPES 2/3 - Paroles d’hommes - 1981 

----------------------------------------------------------------------------------

Plaisirs et sexualité - Les dessous de l'érotisme

" Certes, le réel et l'imaginaire ne coïncident pas, nous le savons, et il ne s'agit surtout pas de les confondre. Mais les mots et le langage sont ils à l'œuvre dans l'imaginaire du lecteur ? "

En posant cette question à propos des livres érotiques, Anne-Marie Dardigna a voulu en écrivant "Les châteaux d'Éros ou l'infortune du sexe des femmes", mettre en évidence, le rôle du discours érotique, des fantasmes qu'il agite.

Écriture de l'imaginaire, l'écrit érotique a longtemps été défendu comme libérateur contre les censeurs et les moralistes. Mais la forme littéraire a souvent masqué le contenu idéologique du texte. Ce contenu a de toute évidence joué un rôle dans la fantasmatique mâle, dans la mienne entre autres il y a eu passage de l'imaginaire aux fantasmes, à un inconscient collectif des hommes. Tellement collectif ce passage, que l'exploration de nos fantasmes en groupe hommes a parfois révélé d'étranges similitudes d'étranges excitations trouvant leur source dans l'esprit érotique et ses dérivés, ses ersatz pornographiques !

" Passage non innocent puisqu'il permet à l'insaisissable d'émerger dans un code enfin reconnaissable par tous, tangible, opératoire dans l'idéologie. La prise de corps du fantasme dans le discours, en le propulsant dans le communicable, l'échangeable, le fait passer du côté du social. (A.M. Dardigna page 21)

Plus simplement, cette phrase d'A.M. Dardigna m'a renvoyé à ce que j'avais lu dans un livre érotique dont j'ai oublié le titre, où l'auteur, rompant l'imaginaire, disait, sûr de son effet : lecteur, je suis sûr que ce qui est écrit là te fait bander et que tu as acheté ce livre pour nourrir ton imagination au moment où tu te masturbes ". J'étais lecteur. C'était vrai.

A.M. Dardigna a donc raison d'interroger la manière dont sont produits dans le récit érotique les fantasmes qui imprègnent l'inconscient collectif des hommes (et parfois celui des femmes). Et il est logique que citant en préalable Alain Robbe-Grillet : " Il y a dans tous mes romans un attentat contre le corps, à la fois corps social, le corps du texte et le corps de la femme, tous trois imbriqués il est certain que dans la fantasmatique mâle, le corps de la femme joue le rôle de lieu privilégié pour l'attentat. " Elle s'inquiète de ce si fort désir des hommes de voir les femmes " partager leurs fantasmes ".

De l'usage quotidien de l'érotisme

La fantasmatique mâle mise en œuvre dans les romans érotiques de Klossouski, Bataille, AndréPierre de Mandiargues, Leixus, Robbe-Grillet ou Bernard Noël a de quoi faire peur quand on la retrouve décortiquée, citée, mise en référence avec la réalité par A.M Dardigna

Je me souviens à cet égard du dégoût que provoqua chez moi Sade, son goût de la viande et des tortures. Je me rappelle aussi de mon rejet courroucé du contexte aristocratique féodal, référant aux rapports de servitude d'Histoire d'O . Mais je prenais prétexte du fait que c'était de la littérature (ça peut figurer sans honte dans une bibliothèque d'intellectuel progressiste) pour cacher l'excitation sexuelle que ces livres provoquaient en moi Peut-on se contenter dans ce cas d'arguer de la liberté individuelle de vouloir réaliser ou non tel ou tel fantasme, nourri de telles lectures ? Je ne le crois pas.

Ce n'est pas un hasard si, dans un même instant, l'effet démultiplié des revues pornos aux devantures des kiosques à journaux m'agressent et en même temps m'attirent. Un jour de solitude, de refoulement, d'absence de mon désir à celui d'une (ou d'un autre), de lit vide du plaisir de côtoyer un autre corps bien réel, ces images m'ont assailli. Excitation après un long moment de latence. Effet différé...

La conscience résiste mais le besoin de support excitatif peut surgir, nourri de femmes-objets, de mises en scène, de représentations dans le théâtre de l'imaginaire. Dans ce jeu, le texte, son évocation des corps, les photos, deviennent donc des référents lourds de sens, surtout quand la répétivité vient à la rescousse d'une excitation quasi pavlovienne .

La brutalité et la subtilité de l'érotisme ou du porno s'interpénètrent et j'aurais tendance à penser que l'érotisme, c'est la porno du riche ou du compliqué. Les mêmes scènes d'agression, de manipulation, de négation des femmes y sont décrites.

En fait les romans-films-photos pornos ne constituent qu'une pédagogie, un didactisme de l'érotisme... Ayant lu des romans pornos, j'y ai découvert de véritables plagiats des scènes " sexualisées " d'Histoire d'O. En ce sens, les auteurs des pauvres scénarios de films pornos n'ont eu qu'à puiser chez Leins, Paule Réage, Klossowski, Sade, etc. et à l'adapter à la demande sexuelle des amateurs d'érections et de branlettes dans les salles obscures.

A.M. Dardigna remonte à la source de façon très lucide, même si elle dérange cet usage bien établi consistant à accepter que tout ouvrage qui dérange la morale bourgeoise, la pudibonderie, serait bon en soi.

" La sexualité par exemple ne saurait être détachée de l'organisation d'ensemble de la cité : l'oppression des femmes dans leur corps et dans leur sexualité notamment se fait implicitement au profit d'une organisation économique et sociale. " (page 32) Combien de publicités démontrent la réalité de ce point de vue !

Voilà pourquoi, en pensant à mon expérience sexuelle personnelle, aux représentations, miroirs, mais aussi stimulis qu'en donnent l'érotisme et ses succédanés (pub, romans d'homme, policier, feuilletons télé, cinéma, etc.), j'estime l'analyse d'A.M. Dardigna sur la structure érotique profondément perspicace. Qu'en dit-elle ?

Quatre dimensions ( invariants structurels ) essentiels traversent les romans analysés dans les châteaux d'Éros. Elles servent à créer l'effet érotique : la transgression, la prostitution, le pouvoir, l'aveu.

Transgresser quoi ? La peur du sexe des femmes

La transgression par l'érotisme ou l'expérience des limites a eu pour théoricien Georges Bataille. Relevons avec A M Dardigna ses propos : " La connaissance de l'érotisme, ou de la religion, demande une expérience personnelle, égale et contradictoire, de l'interdit et de la transgression (...) La transgression diffère du retour à la nature : elle lève l'interdit sans le supprimer. Là se cache le ressort de l'érotisme "

" Ce que nous nommons la perversion n'est rien d'autre que la première réaction contre l'animalité pure. "

La transgression dans le récit érotique se construit donc essentiellement à partir de la peur panique du corps, du sexe et des femmes, dépassable dans la sublimation ou l'effort de connaissance.

" Mais parce qu'elle devient étrangère à l'interdit sans lequel nous ne serions pas des êtres humains, la basse prostituée se ravale au rang des animaux : elle suscite généralement un dégoût semblable à celui que la plupart des civilisations affichent vis-à-vis des truies " (G. Bataille : L'érotisme) ou encore : " La transgression de l'interdit n'est pas la violence animale. C'est la violence encore. exercée par un être susceptible de raison... "

Cette vieille rengaine religieuse, puis freudienne : femme = nature = animal, homme = esprit = humain, joue à plein dans le contenu des récits érotiques. A.M Dardigna en donne de multiples exemples chez d'autres auteurs que Bataille.

Cette fascination/répulsion correspond à l'évocation fréquente du sexe féminin. La culpabilité du regard porté sur quelque chose d'interdit, d'inhabituel et d'inquiétant qui provoque à la fois du dégoût et de l'intérêt. Leiris le formule sans ambiguïté : " Aujourd'hui, j ai couramment tendance à regarder l'organe féminin comme une chose sale ou comme une blessure, pas moins attirante en cela, mais dangereuse par elle-même comme tout ce qui est sanglant. muqueux, contaminé. "

Ces définitions du corps, du sexe des femmes comme lieux à conquérir, à dominer parce que naturels, animaux, dangereux, deviennent aussi des métaphores du monde à conquérir par les hommes. La puissance érotique est affaire de culture et de cérébralité avant d'être gestuelle et sensorielle

A M. Dardigna rappelle Malraux : " Le plus possible, c'est-à-dire de faire de notre conscience érotique, dans ce qu'elle a de plus viril, le système de référence de notre vie. "

Un des effets de ce mode de pensée (mystique chez Bataille) se retrouve dans l'éducation que j'ai reçue. A 15 ans, on m'avait interdit le regard sur les femmes ; " sur la nudité ", disait mon père il parlait aussi de " l'impureté sexuelle " des filles qui couchent sans être mariées. Cet interdit connoté de souillure me pesait. Ma curiosité ne fut point satisfaite dans les sociétés entièrement masculines (internats, classes non mixtes) de mon adolescence. Le corps d'une femme constituait donc pour moi un mystère que je ne pouvais percer que par la connaissance tout d'abord, des représentations imaginaires ensuite. Les supports de ces représentations furent les publicités de sousvêtements féminins, qui constituaient pour moi les seuls demi-accès à la nudité. Et encore. ce fut toujours en cachette, avec la crainte de l'inconnue, avec la notion du péché, d'une conquête que le ne pourrais accomplir que lorsque je serais marié, adulte, avec un métier.

Pour moi, " tout se passait alors comme si le corps, dans sa peur et ses difficultés extrêmes à trouver la jouissance ailleurs que dans les limites de l'horreur et de la souffrance, payait ainsi sans fin le prix de l'exclusion de l'autre. " (A.M. dardigna, page 148) Cette peur, cette angoisse ne me fit pas dériver comme les héros, les maîtres, les châtelains des romans érotiques vers le désir d'asservissement, de volonté de vaincre le corps des femmes. Mais mon imaginaire aurait pu peut-être se nourrir de tels souhaits si j'avais lu ces bouquins à nette époque...

L'aveu

A partir du monopole qu'ont toujours détenu les hommes sur le vocabulaire sexuel, les romans érotiques visent à faire du corps des " héroïnes " l'objet d'un langage agressif, à leur faire avouer " que tout est sexe en elles, et jusqu'à l'esprit. " (Jean Paulhan, préface à "Histoire d'O")

Les romans érotiques mettent sans arrêt en avant avec une grande précision des paroles de femmes désirant être asservies, prises, souillées, violées.

" En formulant la chose différemment, on pourrait dire qu'une femme qui reconnaît et accepte l'existence de son sexe, qui ressent quelque chose à l'endroit de ce sexe, ne peut plus prétendre à la fonction de sujet de son propre désir. Elle se retrouve immédiatement objet du désir et du viol masculins. Ressentir le viol comme un viol est un signe de culpabilité qui légitime donc celui-ci " (A M. Dardigna, p. 156)

" Le crime dont les femmes toutes, doivent faire l'aveu, c'est, ni plus ni moins, celui des fantasmes du juge, de sa névrose ou, mieux de sa perversion. " (A M Dardigna p. 320-321.)

Le récit érotique est à la fois reflet, distorsion et induction de la réalité. Inutile de rappeler le droit au pillage et au viol des vainqueurs lors des guerres. Mais dans une société contemporaine, comme en France, des violeurs ont demandé à leurs victimes si elles avaient joui.

Fantasme collectif : pénétrées, les femmes ne peuvent que jouir. Quelles images, quels écrits disent le contraire ? Les têtes d'hommes sont pleines de ces certitudes que la femme est avant tout un sexe. Un journaliste que j'appelais pour lui parler de la revue, me parlant d'un livre pro-nazi paru au début du siècle, me fit remarquer tout de go : " Évidemment c'est dangereux... il était nazi.. mais il montrait une chose juste : les femmes ne pensent qu'au sexe ! " Ben ! voyons... les mythe ont la peau dure !

Mon imaginaire n'a pas été peuplé des désirs sadiques, des martinets et de tortures. Peut-être parce que j'ai été beaucoup battu dans mon enfance et que l'idée me révulse ; mais je dois dire que j'ai pendant longtemps regardé les femmes comme objets de mon désir, puis comme sujets désirants, les dissociant de leur réalité sociale, les associant à mes fantasmes pour me dispenser du plaisir ; même si dans le quotidien, je me disais convaincu de leur égalité. Cinq ans de relation avec une copine féministe, sa vigilance, son intégralité, m'ont fait évoluer.

La prostitution

" Sur la scène érotique, l'échange ne se produit pas entre un homme et une femme, mais entre deux hommes, et l'être féminin n'intervient qu'en instrument de cet échange. " (A M. Dardigna, p. 299) Dans le procès érotique : " prostituer une femme y tient une place essentielle puisque c'est là le signe symbolique de la négation du désir féminin ; le seul "désir" autorisé à une femme, c'est celui où elle consent à sa propre soumission. " (A M. Dardigna, p. 179)

Ce partage des femmes par les hommes, entre les pères et les fils, entre le souteneur et le client, transforme la femme en monnaie symbolique ou en monnaie vivante. Dette de l'amour de la mère, dette du désir, preuve de la virilité, besoin de montrer qu'on est le maître d'un corps... Les romans érotiques sont pleins de ces seigneurs qui prennent plaisir à voir leur(s) femme(s) avec un autre homme. Ajusté à la libération des mœurs, ça donne les partouzes et l'exorcisme de la jalousie. Mais le désir est-il vraiment partagé ? Dans le récit érotique, certainement pas comme en témoigne ce passage d'Histoire d'O : " Il la donnait pour la reprendre aussitôt, et il la reprenait enrichie à ses yeux, comme un objet ordinaire qui aurait servi à un usage divin et se trouverait par 1a consacré. " (sic)

Je n'ai jamais eu de rapports sexuels avec des prostituées. Mais je les ai côtoyées parlant avec elles de leurs vies, de leurs " protecteurs ", de leurs enfants. Par contre le fantasme de les arracher à leurs " maîtres ", aux " proxos " m'a habité. Ceci confirme à quel point elles n'existaient pour moi qu'en tant que déterminées par les actes d'un autre homme. Je rejoignais ainsi le paradoxe qui veut que les médias évoquent la prostitution, critiquent plus la forme de l'appropriation (critique moraliste du fait de rendre publique en l'échangeant contre de l'argent la " propriété " d'une femme) que son principe même. On dit " libre " une femme appartenant à un seul homme. On dit " prostituée ", " putain ", celle qui appartient à tous. Et on finit par traiter ou penser " putain ", la femme, la copine qui manifeste ou partage son désir avec un autre ! Ma jalousie a été hantée parfois de ce type d'appréciation...

Le pouvoir

De la peur du sexe féminin à vaincre par l'asservissement, en passant par l'aveu et la prostitution appropriation, au pouvoir sur le corps des femmes, une boucle se forme qui caractérise les fondements de la sexualité masculine, la matière même de l'érotisme. Le pouvoir dans les romans érotiques dit A.M. Dardigna s'appuie sur une société dans laquelle la jouissance devient un des fondements de l'inégalité. Les films pornos ont repris cet imaginaire. On n'y montre que des gens beaux, riches, désœuvrés habitant de belles maisons, des châteaux, chez lesquels la puissance sociale cohabite avec la puissance sexuelle. La quantité des actes sexuels, la mesure des tailles de sexes, des volumes de sperme déversés renvoient à la mesure de la puissance. Tout devient prouesses, records sexuels avec comme principe de base que " la jouissance des uns se mesure à la souffrance des autres ". (A.M. Dardigna, p. 214), à leur esclavage.

" La sexualité devient satisfaisante lorsqu'elle se distingue de la norme contraignante imposée à la majorité ; pour guérir les angoisses masculines sur le désir, la menace de castration, l'animalité dangereuse des femmes, rien de mieux qu'un petit délire de pouvoir tyrannique et de luxe inégalitaire. Ce qui suscite le désir, est-ce un corps de femme ou la conscience d'avoir un privilège absolu et une maîtrise totale sur ce corps ? " (A.M. Dardigna, p. 323)

Ce rapport d'érotisation du chef qui transpire dans les romans me renvoie à une anecdote. Responsable dans une organisation politique (P.S.U.), j'avais une image de chef. Avant un déplacement, un jour, un " camarade " me signifia (en toutes confidences bien sûr) mon " droit de cuissage " en me donnant de " bonnes adresses " de militantes... Je fus choqué mais j'ai pu ainsi constater comment se lie le pouvoir et le désir sexuel.

Au total, ce livre qui a pris l'écriture érotique, son contenu, sa forme pour sujet, n'est pas qu'une analyse littéraire, mais une minutieuse observation des fantasmes qui s'incluent à terme dans les pratiques de la sexualité masculine, une dénonciation des archétypes masculins. Tout homme n'est pas dans sa sexualité, dans son rapport avec les femmes, réductible aux héros, aux imaginations (délirantes souvent) des auteurs de romans érotiques. Pourtant il y a des similitudes troublantes. Pour répondre à Brigitte Dormont (cf " Maîtrise ") : oui, mon plaisir, ma sexualité ont été imprégnés de la maîtrise, car les archétypes sexuels que démonte A.M. Dardigna m'ont habité comme tant d'autres hommes. Il y a des liens évidents entre sexualité masculine- érotisme-pornographie et phallocratisme .

Ce lien, cette chaîne entoure " un plaisir qui n'en est pas un " et prend l'allure d'idéologie en ces temps d'érotisation généralisée. Car les romans érotiques disent avant tout le plaisir qu'est sensée prendre la femme par le sexe de l'homme, mais jamais celui que prend l'homme. Le corps de l'homme s'absente, devient caméra, narration, discours... Ceci veut dire que son plaisir n'est pas là. Il réside dans la mise en scène de ses fantasmes, de sa maîtrise, de son regard sur le plaisir de la femme et du regard de la femme sur lui. Il n'est pas dans son corps.

Le plaisir sexuel masculin, confiné à la génitalité par Reich, enfermé dans les " châteaux d'éros " par les auteurs érotiques et la pornographie, peut-il exister autrement ? Pour ma part, je le tente.

Cela suppose d'autres rapports à mon corps, d'autres rapports avec les femmes. Il n'y a pas de recettes, ni de techniques. Je crois qu'il y faut beaucoup d'abandons, à tous les sens de ce terme.

Jean-Yves Rognant

--------------------------------------------------------------------

Revue TYPES  2/3- Paroles d’hommes - 1981

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01429398/document

 


Précédente Accueil Suivante