Revue TYPES 2/3 - Paroles d’hommes

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Revue TYPES 2/3 - Paroles d’hommes - 1981 

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COURRIER DES LECTEURS

Elle me file entre les doigts

Je préfère t'écrire en te laissant libre de faire ce que tu veux de cette lettre. Pour être plus honnête encore, je dirais que la difficulté vient surtout du fait que je n'aie pas envie d'écrire un texte " de fond ", polémique, critique, théorisant. J'ai plutôt envie de te (vous) dire, sans encore très bien savoir pourquoi, à quel point votre démarche m'interpelle. Laisser parler la fibre sensible parce que Types et les groupes hommes sont des événements que j'attendais depuis longtemps et qui s'inscrivent dans ma propre réflexion. J'étais certainement, en manque de cette parole d'hommes miroir/différence de ma parole de femme.

J'ai envie de laisser aller l'écriture au point de dire que votre réflexion éclaire la mienne, qu'il était temps qu'elle cherche son propre territoire, que l'une et l'autre se nourrissent de l'une et de l'autre. J'ai envie...

Types me donne envie : de sourires et de luttes, d'espoir au présent.

J'ai du mal à mettre ma pensée en place, comme si mes idées débordaient des parois de mon crâne.

Que dire, que faire, sinon feuilleter, lire, relire, poser, reprendre, offrir Types. Je crois que je suis séduite, un peu amoureuse de Types, de vos fragilités, de vos interrogations, des erreurs et des victoires à venir. Je crois aussi que l'existence de ces groupes d'hommes me fait l'effet d'un immense bol d'air comme si j'étouffais, de loin, à cause de ce " féminisme ", déformé, agressif et un peu sans espoir. Je dis de loin parce qu'il y avait un bon moment que je ne me préoccupais pas de ce que donnerait ce mouvement et que d'ici, penchée au-dessus de la mer, j'oublie les choses qui semblent parfois vitales à Paris. De loin, ça veut aussi dire isolément, mais d'une certaine façon, un moyen d'échapper aux modes, de construire son chemin, sa recherche au rythme qui est le sien. Et même si de la " capitale " il semble qu'il ne se passe rien, en fait cette région vit comme beaucoup d'autres, avec ses mecs éparpillés, avec ses femmes en question.

C'est marrant, je m'attendais à ce que la revue soit bien reçue mais là, vraiment ça dépasse tous mes espoirs. Elle me file entre les doigts. Ils et elles se l'arrachent !!! Je vais en passer quelques-unes à une copine de Lyon que ça intéresse et qui se propose d'en vendre. Tu vois, des femmes, encore des femmes. C'est nous qui avons l'air les plus sensibilisées. Enfin, c'est à voir ! Mais j'aime les réactions des femmes qui lisent Types. Elles aussi se sentent concernées, émues et espèrent que Types a une longue vie devant elle (eux !).

Ils, elles nous ont écrit

... En tout cas, il faudrait faire une réunion sérieuse sur le thème du Père, je sens que l'idéologie, va nous récupérer ce non-mouvement social de la paternité, et que les féministes vont bien encore rigoler

Gérard — Grenoble

... Je trouve fantastique que des hommes puissent dire et écrire certaines choses que j'ai ressenties avec ma fille.

Rafaela — Paris

Je viens de survoler le 1er numéro de Types et je profite de l'enthousiasme de cette lecture... Ce 1er contact m'a bien plu, bien que je n'y ai pas encore assez réfléchi pour dire grand-chose de plus (ce sera pour la prochaine lettre). Les questions sur la paternité m'étant à la fois lointaines, puisque n'étant pas père et proches puisque étant occupé par un désir d'enfants de plus en plus fort...

Félix — Marseille

Chers mecs

Je viens de lire un article du MondeDimanche (14 sept. 80) sur les " nouveaux hommes ", et j'ai été touchée aux larmes d'apprendre que des mecs se réunissent pour établir de nouveaux rapports entre eux, et, partant, entre eux et les nanas. En fait, je le savais déjà, mais je n'avais absolument aucun détail parce que ce genre de réunions est plutôt " quasi-clandestine " et, de toute façon, probablement rarissime. J'ai eu un coup au cœur, parce que j'ai très peu l'occasion de rencontrer des mecs qui se préoccupent sérieusement de descendre de leur piédestal et de se reconnaître enfin très proches " humainement " des nanas. C'est tellement réconfortant de savoir que des mecs se mettent, eux aussi, et volontairement (je veux dire : sans que leur initiative soit forcément la résultante du féminisme), se mettent en chemin vers l'établissement des rapports plus intéressants pour tout le monde... Je vous aime et je vous embrasse tous très fort.

Brigitte — St-Gildas de Rhuys

Merci pour l'envoi du premier numéro de Types, et félicitations pour le travail accompli. Néanmoins... quelques réticences quand même sur le poids du vécu et l'absence quasi totale de toute tentative d'analyse de fond. Pour en parler, pour parler de beaucoup de choses encore, j'aimerais bien avoir un contact avec quelques groupes ainsi qu'il est suggéré dans la rubrique " Toucher avec ", sur Paris.

Philippe — Paris

J'ai découvert dans Ardecom n° 2 votre tentative de revue et cela m'intéresse bougrement pour diverses raisons.

Je revendique le droit à la poésie, la sensibilité ; je ne me reconnais pas dans la virilité militaire, sportive, dominatrice, castratrice de rêve, d'imaginaire.

Alors voilà, un petit mot, un signe. L'Homme doit se libérer de lui-même, de sa suffisance, de sa comédie au monde, de son anti-vie.

Régis — Carcès

En effet, le contenu du texte que vous avez réalisé va tout à fait dans le sens de beaucoup de mes questions à l'heure actuelle. Interrogations qui, comme beaucoup de " mecs ", sont apparues à la suite de changements assumés par des Femmes proches de moi, et qui me remettaient en cause.

Actuellement j'ai envie d'essayer de répondre un peu à toutes les questions, et je crois que votre démarche m'y aidera.

Michel — Varenne-Javay

Dans le n° 1, je vous trouve trop " intellectuels " et décevants. Vous devriez plus témoigner de vos sentiments et non de considérations (floues pour les autres) quand vous évoquez un problème : problème de la paternité par exemple. La dernière partie du n° 1 est à cet égard plus valable.

Bernadette — Schiltigheim

Je suis adepte définitive de la nonmixité parce que nos antagonismes nous conduisent à l'expression violente de nos oppressions.

Cela ne m'empêche pas de vous encourager et de lire votre revue. Amicalement.

Marie Élisabeth

M.L.F. non reconnu par la préfecture de police.

Tiens un souhait : que l'on ne fuie pas dans des formes trop littéraires. J'ai eu quelquefois l'impression que c'était ce qui se passait pour certaines " Paroles d'hommes " écrites. Peut-être une façon d'esquiver un peu, de ne pas se regarder bien en face ; le pas est tellement grand. L'affolement nous pousse peut-être à nous accrocher à la forme pour ne pas être broyé par le fond. (Tiens c'est drôle ça !) Pourtant les problèmes ne manquent pas : rapports avec les femmes, les enfants, les autres hommes ; besoin de se découvrir en tant qu'individu ; sexualité ; limites de la liberté sociale ; respect de toutes les différences ; besoin d'autorité, de domination (par lequel nous sommes pour la plupart alimentés). Famille... ou autre chose à inventer ?

Et plus généralement comment situer toutes ces démarches individuelles, et beaucoup d'autres, dans un cheminement plus large vers une autre société.

J'espère que Types s'attaquera à tous ces problèmes. Faute de quoi à mon avis il risque de sombrer dans des problèmes égocentriques peu intéressants. La démarche individuelle est une partie du mouvement social. Je crois qu'il ne faut pas perdre de vue.

Maintenant... ce que je vous en dis... !

Christian

Je suis intéressé par votre projet ; questionné moi aussi par les mouvements féministes, j'ai eu envie d'échanger avec d'autres mecs notre recherche d'être homme autrement. C'est resté pour l'instant au stade d'un désir non réalisé. Je ne sais pas comment votre affiche est venue au Havre (vous savez, tout au bout de la Seine, derrière la fumée des usines pétrochimiques) mais je suis bien content de l'avoir entre les mains.

Jean-Luc – Le Havre

Bonjour hé sorciers

Types, dont la parution avait été annoncée dans la revue d'Ardecom, que j'attendais, est entre mes mains, et les heures passées à butiner cette revue à la présentation agréable, sont des heures de dialogue, de plaisir. Ce concert de voix forme un écho à ma réflexion sur la paternité, me permet de cerner et mes points de convergence et ma singularité. Je suis sensible à l'expression de ces vécus d'hommes dans lesquels je trouve toujours une part de mon propre vécu. La revue m'apporte aussi des informations notamment sur l'historique du mouvement. Groupes de paroles d'hommes, causerie entamée, à poursuivre.

Seulement voilà, je vis dans une petite ville tout au fond de la province occitane, à distance des capitales régionales Toulouse et Montpellier où j'ai découvert par hasard " Contraception Masculine " il y a quelques mois. J'habite à Millau, une petite ville à la population plutôt vieille, où je me sens assez isolé, où est difficile à réaliser l'échange de réflexions sur le rôle masculin, un dialogue véritable, non conventionnel, conforme à mes désirs.

Millau, vous situez ? C'est au pied du tristement célèbre Larzac, cet étendard ample et mouvant du refus, un espace de revendications multiples. Larzac, mauvaise conscience de la virilité. Terre violée par l'homme en arme tirons un coup. Terre stérilisée au nom du Père-Pouvoir ravageur.

Un jour, plus tard sans doute, nous dirons Millavoix, Larzaciens, Aveyronnais et autres, la nature évolutive de notre combat (oui, on s'est battu et c'est pas fini), de notre militance, de notre investissement ; onze ans déjà que mon itinéraire et l'itinéraire de cette lutte se croisent depuis mon attitude de " combattant ", jusqu'à l'aveu, la découverte de mes faiblesses (ou de ma force), ma distance vis-à-vis de tout rapport.

En 1978, à Millau, j'avais pensé provoquer la création d'un groupe du style " pas rôle d'hommes ". C'est alors que je suis parti pour un pays lointain où j'ai tenté d'établir un échange fructueux avec des gens fonctionnant si différemment de moi. Là des regards nouveaux étaient portés sur moi et ont modifié rétrospectivement le regard que je portais sur moi et ont nourri des doutes. Je me suis mis à l'écoute de mecs de mon âge ou plus jeunes (j'ai à présent 26 ans), essayant de comprendre leur problématique. Deux ans en Inde. Et le retour à Millau et le plaisir de constater que les choses avaient évolué en France dans le même sens que moi. Coïncidence entre ma sensibilité à la question de la paternité et celle qui est révélée dans des bouquins comme " Le père acte de naissance " et les revues " hoministes ", de même pour la question de la contraception masculine.

J'ajouterai une chose. La remise en cause des archétypes masculins a bénéficié de l'impulsion donnée par le courant féministe ; nous en sommes tous conscients. Je souhaite néanmoins que la reconquête d'une parole masculine libre (libérée), atteigne sa maturité et peut-être plus d'authenticité en se démarquant des formes d'expression féminine que nous avons tendance à reproduire. Soyons aux côtés mais aussi à côté de nos Sorcières bien-aimées.

Fraternellement et à bientôt ! JOËL

On peut déjà vous l'annoncer : le prochain numéro vous procurera autant de plaisir que celui-ci ; l'expérience aidant. Mais l'indécision nous saisit quant au thème du prochain numéro. On envisage : " les hommes et leur corps " ; " les discours des hommes " ; " les relations entre hommes " ; " la violence et les hommes "... Celui qui sera choisi n'exclura pas que les autres paraissent plus tard

Sur ces sujets ou d'autres, faites-vous plaisir : écrivez-nous !

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Revue TYPES  2/3- Paroles d’hommes - 1981

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